Tout comme l’eau est ce qui est l’origine de l’humidité, Shiva est l’origine du jiva – l’être individuel. Shiva est la conscience. Par le jeu de l’illusion, votre conscience s’est identifiée au corps. C’est pourquoi vous finissez par mourir. Je ne suis pas en train de parler au corps, je parle à la conscience qui entend à travers les oreilles. La conscience qui s’exprime en tant que corps, avec un nom, est appelée un aspirant : celui qui est désireux de libération. Tous les dévots de par le monde sont au moins aspirants (mumukshus). Le dévot qui a abandonné l’identification au corps est appelé un chercheur (sadhaka). Les aspirants peuvent être de très bons élèves, mais ils ne sont pas pour autant des chercheurs. Une fois convaincu de sa vraie nature, au-delà de tout doute, le chercheur devient un siddha – celui qui est libéré. Un aspirant est homme ou femme par identification au corps. Le chercheur n’est ni masculin ni féminin. Celui qui écoute est sans forme. Ce qui agit et s’occupe des affaires du monde a une forme. Mais la forme a-t-elle encore quelque valeur, si l’énergie qui ne possède pas de corps n’est pas présente ? La conscience qui écoute est Dieu. Ce fait doit être établi profondément en vous. Si vous ne saisissez pas votre qualité réelle, vous aurez peur de la mort. Vous avez infligé une peine de vie très laborieuse à Celui qui est libre par nature. La nature du Soi est conscience, et non pas personnelle. Le jiva se réfère à un sens de la dualité, de la séparation. Simplement par les concepts, les images arrivent sans aucune substance. Qu’il y ait forme ou pas, la conscience est illimitée et infinie. Elle est à la fois manifestée et non-manifestée. C’est uniquement pour amener une compréhension que tout ceci est exprimé ainsi par les mots. Sans savoir comment, vous êtes venu à connaître que vous êtes. Cette compréhension est sans forme. Les choses sont vues uniquement quand le mental leur donne une consistance. Il n’y a aucune différence entre celui qui parle et celui qui écoute. L’aspect du flot des pensées est en concordance avec la qualité de la forme. Pour celui qui se voit sans forme, le flot sera de même (libre de la forme des pensées). Mener à bien des actions est la caractéristique de Rajo guna (la qualité qui fait bouger quelqu’un et le force à agir). Tamo guna (la qualité de l’appropriation) tire à elle le bénéfice de l’action et fait dire : « J’ai fait une bonne ou une mauvaise chose. » La conscience se satisfait de sa propre qualité (Sattva guna.) Toutes les activités apparaissent dans la manifestation. Tout cela est éphémère. Il n’y a rien de tout cela dans le non manifesté. Par la vibration du prana, la conscience originelle est devenue vaste. C’est un phénomène passager, c’est pourquoi on dit qu’il est illusoire. Quand c’est au-delà de la conscience, cela devient non manifesté, même en présence du corps. Alors comment pourrait-il y avoir mort ? C’est comme la chaleur qui est à la fois manifestée et non manifestée. La chaleur disparaît de l’eau chaude quand celle-ci refroidit. De la même façon, celui qui a connaissance du Soi finit par disparaître. Quand le prana s’en va, la chaleur du feu fait de même. Le jnani ni ne vient, ni ne va. Il est non manifesté par nature. Les pensées liées aux activités coulent dans le mental de celui qui est investi dans les affaires du monde. De la même manière, le chercheur n’a de pensées que pour la réalisation du Soi. Liez-vous d’amitié avec votre conscience en la considérant comme Dieu. La vénérer vous rendra heureux.
Nisargadatta Maharaj
dimanche 13 mai 1979
Extrait de “Méditations avec Sri Nisargadatta Maharaj” aux éditions Aluna