Visiteur : Maharaj accepterait-il de parler de l’abandon, de la spontanéité, du maintenant?
Nisargadatta Maharaj : Il n’y a pas à chercher le maintenant ou quoi que ce soit, mais à être éveillé, attentif à sa propre conscience, c’est tout. La conscience doit être consciente de sa faculté de prendre conscience. Rien d’autre n’est à faire, aucun acte particulier à remplir. Parler d’abandon est simplement une manière d’exprimer cela. Vous êtes pure présence consciente, vous l’êtes et vous n’avez pas à vous le répéter avec des mots. Gardez- le au fond de vous-même. Rappelez-vous toujours : la conscience est toutes choses, tout , pour tout être pensant. S’il n’y a plus de conscience le monde n’existe plus. Cette conscience est avec nous à tous les moments de notre existence. Cette connaissance n’a pas d’aspect ou de forme, elle est semblable à la lumière, la lumière de la vraie connaissance, elle est de la nature de l’amour. Comprenez bien que cette conscience n’est pas représentée par le corps, qu’elle est seulement lumière.
La lumière révélant l’existence, voilà votre véritable nature et ne demandez pas ” qui sont les parents de la lumière” ou “quelle est sa caste”, elle est là et c’est tout.
la lumière est la découverte ” je suis”; C’est l’aboutissement du corps-essence-de-nourriture. Ce ” Je suis” est la condition indispensable pour que le monde apparaisse à l’existence, dans son image est contenu tout le reste. Observez, percevez, regardez ce ” je suis” sans l’oeil physique. Cette conscience précède la vue. en de hors de cette certitude ” je suis” que pouvez-vous posséder d’autre?
Sans nom, sans corps parlez-moi de vous-même. Dites-moi quelque chose sur vous sans vous référer à vos souvenirs ou à votre intellect!
Quand votre corps sera usé ou endommagé, la conscience s’en dégagera et les gens à l’extérieur diront ” il est mort”. Mais vous, qui êtes la connaissance ” je suis”, vous ne le saurez pas car rien ne sera changé. Le principe qui s’éteint n’est pas le corps, c’est ce qui alimente le corps et ce n’est pas vous.
V: Dans le sommeil profond, la conscience est immergée dans Parabrahman et le corps vit au ralenti attendant son retour. C’est donc uniquement la force vitale liée à la respiration qui relie les deux, cela semble une force très puissante. Est-elle cette source, cette racine de la manifestation dont vous avez déjà parlé?
N.M: Oui, la force vitale est très importante, très puissante. Tous les mouvements, toutes les actions sont causées par cette force vitale-prana. À l’intérieur du corps elle est prana. À l’extérieur elle est l’air, l’espace. Vos activités semblent avoir lieu à l’extérieur mais elles se produisent en fait à l’intérieur. C’est la conscience qui ressent la peine et le plaisir, ce n’est pas le corps. C’est la conscience qui perçoit un monde appelé extérieur – en fait, tout se passe à l’intérieur, tout a lieu seulement dans le corps subtil. Quand la force vitale arrive à sa fin, le monde s’arrête, tout s’arrête, parce que la conscience n’est plus là.
je parle toujours de la connaissance intérieure. Vous, vous cherchez à vous connaître en vous appuyant sur ce qui est à l’extérieur de vous, cela n’est pas possible. C’est parce que vous êtes identifié à votre corps que vous percevez une action extérieure. Quand vous vous connaîtrez, quand l’identification au ” je suis une forme” aura cessé, vous connaîtrez votre être et tout sera vivant et vrai parce que pour le moment rien n’est réel pour vous. Ce n’est jamais le corps qui découvre qu’il existe c’est la conscience présente à elle-même, qui donne réalité à toutes choses. la conscience de quoi que ce soit ne peut être qu’intérieure.
Dans le processus de la méditation, la première chose nécessaire est qu’il n’y ait pas de pensée, pas de mot, plus rien de mental, plus rien de signifiant. Portez votre attention sur la non -attention.
Identifié au corps, vous parlez beaucoup mais sur cette question de la conscience, vous ne dites pas grand chose! Allez-vous comprendre ceci: au centre de vous-même, il y a cette connaissance “Je suis”. Demeurer présent à ce ” je suis” a une grande importance, une grande signification et à un certain stade de maturité il devient sans signification.
S’immerger dans cette connaissance ” Je suis” est Bhagavan, splendeur. C’est une illumination éclairant comme la foudre. Vous êtes seulement lumière et de cette révélation le monde surgit. Ayant atteint ce stade, vous êtes le pur joyaux du diadème, le diamant au sommet de la couronne. Mais ayant assimilé, pleinement éveillé, ce qu’est le monde, ce qu’est cette conscience, vous souhaitez vous en débarrasser. Vous découvrez que cette splendeur est le siège de toutes le erreurs, de tous les mensonges. Quand vous l’avez totalement compris, vous transcendez cet état. Ce n’est plus rien, c’est comme du mucus dans la gorge qui vous gêne, vous le crachez.
Habituellement, vous ne comprenez pas ce qu’est ce principe de naissance, vous pensez tout de suite à l’apparition du corps, ce n’est pas cela. La naissance est l’apparition de cet élément premier contenant la connaissance ” je suis” en dormance, le corps se forme après. C’est le ” je suis” enfoui dans la matière qui est la naissance. Quand vous observez ce processus en action dans tout ce qui existe, alors vous vous dites ” je dois me séparer de tout cela, cela ne vaut pas la peine de continuer”.
Tant que vous êtes mus par ce principe de conscience, ce sont les agents catalyseurs qui mécaniquement régissent toute activité, leur présence est indispensable. La racine de tout ce qui est, est liée à ces éléments premiers supportant le ” je suis”. Toute action dans votre monde est liée à ce principe de conscience rattaché à la forme.
Vous croyez que lorsque cette matière est usée elle arrive à extinction, c’est faux! tout ce grand jeu du monde est ré-aspiré et retourne au non-manifesté. Manifestation, puis retour à la source non manifestée avant de se manifester à nouveau. La mort n’est pas seulement la disparition de ce qui existait. On cherche habituellement à éviter la mort mais ceci est un retour au non-manifesté, à la perfection originelle.
V: Tout retourne en ses éléments premiers qui sont eux-mêmes réabsorbés?
N.M : Vous interrompez le spectacle. La conscience ferme boutique et liquide tout. Voilà ce que l’on appelle habituellement “mort” mais ici ce n’est pas une fin, c’est simplement le retour au non-manifesté, c’est à dire à la plénitude. L’imperfection devient perfection.`Comprenez que tout provient des éléments de base. Le plus grand génie, le plus grand inventeur, c’est dans son élément primordial qu’a jailli l’idée nouvelle ou la découverte, ensuite il n’y a plus eu qu’un processus mécanique le mettant en forme. Sans ce jaillissement du sans forme dans la conscience, l’enchaînement mécanique ne peut se produire et ce jaillissement provient de l’élément premier, de l’élément de base.
Comprenez-le ainsi : le département”mécanique” organise toutes les activités, mais le chef, le patron, est le principe de base.
Vous ne trouverez ces vérités spirituelles exposées nulle par ailleurs. Je regrette le départ de Maurice Frydman, il avait parfaitement assimilé ce qu’était l’élément premier et ce qu’était l’activité mécanique, mais je n’ai jamais abordé ce sujet dans les entretiens de “I am that”. Celui étant à même d’exprimer ceci en mots doit non seulement connaître l’élément premier et l’action mécanique, mais aussi être un avec cela.
V: Est-ce que le “Je suis” est l’élément premier?`
N.M “Je suis” est potentiellement dans l’élément premier. Initialement tout est exprimé au travers de cet élément premier, ensuite à travers le corps qui mécaniquement l’exprime dans le monde.
Ces éléments de base sont très importants, ils célébrent la gloire de toutes les déités, c’est Bhagavan, mais quand vous aurez réalisé ce que c’est , que vous serez uni à cela, vous vous en débarrasserez pour atteindre l’état parfait.
Quelle conclusion allez-vous retirer de tout ceci et en vous conformant à ces conclusions quelle conduite allez-vous adopter dans le monde?
V: J’ai l’intention de …
N.M: Non. La conclusion d’abord.
V: Oui. Ma conclusion est qu’il faut demeurer dans le présent, dans le jaillissement de l’inconnu et pour cela je vais m’efforcer de suivre les mouvements de la conscience, flotter entre l’extérieur et l’intérieur.
N.M: Traditionellement, on parle de trois mondes, le ciel, la terre et l’enfer, c’est là que vous souhaitez aller flotter? Ces mondes sont seulement contenus dans la conscience. Que voulez-vous faire?
V: Je ne veux rien faire, justement, rester dans le présent.
N.M: L’activité est le présent.
Le non-manifesté découvre son être au travers du manifesté. C’est uniquement le non manifesté qui expérimente ce ” Je suis”. Écoutez bien ceci : le ” je suis” est une illusion et tout le reste est vrai.
Vous écoutez ces entretiens depuis plusieurs jours maintenant, parlez-moi de ce que vous n’avez pas retenu!….
Entretien 5, deuxième partie du recueil ” Sois” publié aux éditions des deux Océans.
Bonsoir Ji Phi, (Phi, pour le nombre d’or ?, ou pour Philippe ?)
Juste dire : un grand MERCI ! ! ! De ta présence, d’abord, et de ce site… publier ces extraits de Sri Nisargadatta, le mettre accessible à tous, qui passent ici, par hasard, ou recherche, et qui se demandaient : mais comment, grands dieux!, en sortir du manège, de la grande roue du monde, cette illusion, ou cette hallucination?, collective, qu’on s’est tous pris dedans… et sans comprendre trop grand chose, ni comment, ni pourquoi …
Et maintenant, Je Vois…
Seule la Conscience peut mener à la Conscience, à Soi, pur, originel, libre !, qu’il n’est besoin de rien d’autre… rien autre que Soi… pour revenir à Soi…
Plus jeune je disais que : seul Dieu peut mener à Dieu… peut voir Dieu… connaître Dieu… Être Dieu… …sourire…
Salute Ji Phi !
Leelee Spleen
Merci pour ton témoignage. Bien à toi, en unité ✨🙏✨
(p-s: Phi, pour les deux)
“le ” je suis” est une illusion et tout le reste est vrai.”
Intéressante citation qui m’interpelle dans sa signification ; est-ce à dire que seul le non-manifesté est vrai? Ou est-ce un problème de manque de contexte ou de traduction et qu’ici dans cette phrase le “je suis” signifie le corps-mental fausse identité (càd “je suis cela”) et que seul ce qui le génère, l’êtreté, est vraie? Mais cette dernière ne peut être résumée en mots uniquement par “je suis”, donc je suis un peu suspendu sur cette fin que je ne saisis pas complètement… 🙂
En effet après toutes mes lectures je serai surpris de découvrir que NSM utilise le terme “vrai” pour qualifier le non-manifesté, car cela implique qu’il y ai un faux à lui opposer, hors nécessairement le non-manifesté est au-delà du vrai et du faux, il est totalité.
Qu’en pensez vous?
Encore et toujours, merci pour votre bhakti.
Votre lecture est juste.Il convient de remettre ces propos dans leurs contextes pédagogiques.D’une part Nisargadatta commence par balayer tous références et concepts ,jusque là non remis en cause par son interlocuteur. D’autre part, il ne s’agit pas ici de vouloir améliorer quoi que soit de ce qui se manifeste, d’où l’insistance pour en faire lâcher toute prise, afin que toute l’attention puisse être portée vers ce qui n’est pas saisissable par le mental. Première invitation ,revenir au “je suis” : porte ouverte “d’un coté” sur toutes manifestations ( le temporaire, l’éphémère : le faux) et de “l’autre coté” sur le non manifesté, le non-perçu, le sans visage,ect .. évocable qu’en terme de négation, est considéré comme le réel. Ceci du point de vu du manifesté, donc du faux. Depuis la position du réel, il n’y a que Cela ,qui n’est ni réel, ni faux, comme vous l’évoquez Bien à Vous