Nirupana 20 – Aucune expérience ne dure

 Aucune expérience ne dure.

À vrai dire, un individu n’a pas de forme. Ce que l’on appelle forme est constitué des cinq éléments. Dans le corps se trouvent les cinq sens. Auquel allez-vous continuer de vous identifier ?

La plupart des gens sont intéressés par ce qui concerne les perceptions sensorielles. Ils ne perçoivent pas le corps comme irréel. Tout le savoir du monde est basé sur les mots. Cherchez si celui qui possède ce savoir des mots a une forme. La contemplation de ce qui n’est pas le Soi n’est pas vraie. La méditation concerne uniquement le Soi. La connaissance dans le corps doit être trouvée. Elle n’est pas personnelle. Dans la bouche, le sucre fond mais sa douceur perdure.

Est-ce que la douceur possède une individualité ? Il y a juste la trace d’une manifestation. C’est tout.

Aucune expérience ne dure. Celui qui expérimente ne peut pas être décrit, nous sommes celui qui expérimente. Ce qui dépend de la force vitale et de la conscience ne dure pas. L’éternel est avant ça. Nous devons regarder le concept « Je suis quelqu’un, Je suis quelque chose ». Tout ce qui se manifeste, le fait en accord avec la nature du temps. Le désir d’atteindre la réalisation du Soi apparaît lui aussi conformément aux dictats du temps.

Quand la conscience apparaît, le monde devient visible. En grandissant, vous quittez l’enfance.

De la même manière, en acquérant la connaissance juste, vous quittez l’identification à la forme corporelle.

Comme vous ne pouvez pas faire autrement que d’utiliser les mots, vous dites que Dieu est le créateur. Est-ce que le Dieu si bienveillant créerait un tel chaos ? Sans nous, Dieu n’existe pas. Dieu n’est rien d’autre que la certitude que vous avez d’exister, rien d’autre que l’amour que vous éprouvez pour votre existence.

« Je suis » est Brahman. Ce qui se tient derrière est appelé Parabrahman.

Dans un premier temps, vous accédez à Brahman, ensuite vous et Brahman disparaissez (la conscience se déploie, se fond à l’univers tout entier, puis se dissout. Ceci se produit dans un état de profonde méditation). Ce qui fait dire au jnani qu’ultimement il n’y a rien. Alors pourquoi enseigne-t-il ? Voici une réponse : quand quelqu’un doit aller uriner, il y a urgence à le faire. Pendant que cela se fait, n’est-ce pas apprécié ? De la même manière, le corps du jnani est perçu temporairement, comme une envie pressante d’enseigner.

Le rêve premier est la sensation d’existence. Tant que vous vous référez à Dieu, vous n’avez pas atteint votre destination. Paramatman n’a ni naissance, ni mort. Alors pourquoi Krishna dit-il : « Je suis né tant de fois ? » Toutes ses naissances concernent les cinq éléments. De telles naissances se produisent par millions, chaque seconde, en Paramatman.

Les Écritures sont les concepts des poètes. Ils vous soudoient autant qu’ils vous menacent. Pendant le sommeil, il n’y a pas d’expérience de soi. Le sommeil ne peut pas être perçu une fois réveillé. Dans le même ordre d’idée, maya ne peut être imaginée. Tout comme le sommeil ne peut être connu, maya ne peut être connue, que ce soit des dieux ou des humains.

Maya apparaît lors de la manifestation de la conscience. Avant cela il n’y a pas de maya. La pensée « Je suis » est la perturbation. Même les plus grands dieux ne comprennent pas maya, car ils sont créés par elle. Ils ne sont pas auto créés. Leurs actes sont illusoires. Celui qui est détaché n’est pas concerné par maya. Le sommeil profond est synonyme de totale ignorance. C’est de là qu’émerge la sensation « Je suis ». C’est le commencement de maya. Alors, avec la sensation d’être réveillé, je m’en vais fièrement négocier mes affaires, dans un monde qui n’existe pas. La sensation « Je suis réveillé » crée le monde. Cela se produit par maya. Quand vous réalisez cela, la sensation « Je suis celui qui fait » s’évapore.

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Quand vous saisissez le Soi, il l’est en tant que « vide vide », plus vide que ne peut l’être un rêve. La représentation de « Je suis comme ceci ou je suis comme cela » vous a donné forme. Ce qui a été créé, sera pour sûr détruit. Qu’est-ce qui est créé ? Notre conscience. Quand la sensation « Je » émerge, elle devient l’ego.

Vous ne pourrez pas écouter cela tant que vous n’êtes pas prêt. Une fois entendu, cela devra être rappelé et rappelé encore. C’est le commen- cement d’un processus. Cette forme vous est apparue spontanément. Personne ne l’a créée. Vous ne seriez pas ici, si vous n’aviez pas eu l’ins- piration intérieure de chercher le sens profond de la vie. Ce n’est pas le genre de dévotion dont le propos est d’acquérir quelque chose. Le propos de cette dévotion est la libération par l’écoute. L’idée que vous êtes un homme ou une femme, avec les comportements qui vont avec, est fausse. Ce n’est qu’une apparence. Pour connaître cela, certaines qualités sont requises. La connaissance « Je suis » est votre Divinité. Comprenez cela. Différents noms Lui sont donnés. Le fait qu’un certain plaisir à écouter cela grandit en vous est, spirituellement parlant, un bon signe. Quand la connaissance de votre existence sera parfaitement claire, vous transcen- derez maya. La conscience révélera alors sa propre valeur. La manifesta- tion est une, mais ses noms sont multiples. Tous les noms sont ceux de maya. Une fois réellement connu « Je suis partout », le connaisseur ne sera plus différent de la connaissance. Aucune expérience ne dure. Quelle que soit la manière dont vous vous considérez, elle s’en ira. La sensation d’être réveillé est aussi un concept. Sommeil et veille sont des attributs de votre nature impermanente. Quand vous entrez dans le sommeil profond, vous vous débarrassez de vous chaque jour. Si ce sommeil ne s’arrête pas, qu’allez-vous faire ?

Que la mort arrive aujourd’hui ou dans un millier d’années, ce sera la fin de tout ; il n’y aura pas de problème. Le détachement est la sensa- tion que tout ceci n’est qu’une apparence. Quand la Vérité est saisie, les faux concepts s’en vont. Aucun effort particulier n’est nécessaire pour cela. On appelle cela : une offrande à Brahman.
Il est dit dans les Écritures : « Au juste moment, Bhagavan s’incarne et nourrit le dharma. » Il s’agit ici du dharma de notre vraie nature. Alors que quand les gens évoquent le dharma, il s’agit du dharma du corps.

Le Guru est une incarnation de Dieu. Par la dévotion au Guru, maya, qui apparaît démoniaque et immense, est réduite à une taille infime. Ne négligez pas la conscience qui est en train d’écouter. Elle est pure et immaculée. Gardez cela présent et vénérez-le. Ne perdez pas cette connaissance du Soi dans la connaissance de votre existence. À cause des impuretés du mental, vous vous enfoncez dans les bois et subissez toutes sortes d’épreuves. Si ces impuretés sont retirées ici et maintenant, alors que vous écoutez, vous n’aurez pas à vous enfoncer dans les bois ou à gravir les montagnes.

 Nisargadatta Maharaj

dimanche 2 avril 1978

“Méditations avec sri Nisargadatta Maharaj” aux éditions Aluna

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