Celui qui s’est dissous dans sa vraie nature est un yogi. La prospérité ou la pauvreté ne l’affectent pas. Vous considérez-vous comme autre chose que votre nom ? Le nom n’est que des lettres. Êtes-vous ces lettres ? Le nom a été donné au corps. Maintenant, le corps est devenu votre identité et votre nom est devenu vous-même. C’est devenu une habitude. Ceci sous l’influence de maya. Pouvez-vous me parler de vous quand vous ne vous prenez pas pour le corps, ni pour le nom donné au corps ?
À quoi ressemblez-vous quand vous dites : « Je ne suis ni le corps, ni le nom ? » Alors quel nom peut vous être donné ? Et après tout, qu’est-ce que la conscience ? N’est-ce pas l’amour, ou le goût, le parfum qui reste après avoir laissé le corps et le nom ? Qu’est-ce que l’on pourrait vouloir quand on est ainsi ? La conscience est elle-même amour. C’est la félicité naturellement présente dans la sensation « Je suis ». Elle transcende le corps. Elle n’a pas la forme du corps. Sans la conscience, y aurait-il Dieu ou le monde ? Comment nous voyons-nous dans le corps ? C’est une pure luminosité. Son symbole est la lumière. La lumière de la conscience signifie la lumière d’Atman. Elle est sans forme. Elle est indivise. Elle est sans corps et sans nom. Elle est comme l’espace.
Qui vient en premier, l’espace ou la conscience ? Quand il n’y a pas de conscience, il n’y a pas de monde. Combien de temps le monde existe-t-il ? Aussi longtemps qu’un individu est conscient. Celui qui a réalisé le Soi est un grand yogi. Dieu, le Guru, la conscience, sont identiques pour lui.
La sensation « Je suis » est le commencement du temps. En tout premier, la conscience surgit et ensuite le monde est vu en elle. Est-ce que quelqu’un a fait quelque chose pour cela ? Quand la conscience disparaît, le monde disparaît aussitôt. Que sont devenues les grandes montagnes ? Qui les a avalées ? Personne, parce que le monde était factice, parce qu’il était une illusion. Par la naissance de la connaissance « Je suis », le monde vient à l’existence. Les deux se produisent simultanément.
Ne dites pas que vous avez compris. Soyez présent à ce que vous avez continuellement entendu. L’usage du corps est destiné à la conscience, par laquelle nous avons connaissance d’être. C’est l’essence de nourriture. Celui qui voit le rêve est celui qui est l’auteur de ce rêve. N’est-ce pas ainsi ? Faire bon usage de la conscience veut dire être convaincu de ceci et se comporter en rapport.
Seul un Guru peut donner de justes conseils. Les autres distribuent des consolations avec de faux concepts. La conscience est universelle. Dieu, Guru, et « Je », sont tous ses noms. Le nom commun est Brahman. Il est là aussi longtemps que le verbe (la manifestation) est là. Sa caractéristique est la connaissance. Ce Brahman manifesté, omniprésent, se dissout dans l’Absolu. Il n’a pas d’identité propre. Il est intemporel.
Le fondement de notre voie spirituelle est l’attention à soi. Le Sadguru est intemporel. Il est sans allées et venues. N’est-ce pas ainsi que l’on connaît l’Absolu ? N’est-ce pas ainsi qu’on ne le connaît pas ? (Il s’agit de notre véritable nature, sans dualité). Le corps est nourriture pour la conscience. Le prana mange cette nourriture, pas le Soi. Le prana mène toutes les actions. Celui qui a clairement connaissance de ne pas être le corps, ne souffre pas des gains et pertes dans le monde, des plaisirs et des douleurs. Ce qui a connaissance du prana est la conscience. Elle est uniquement témoin. Pouvez-vous amener un poil de Bombay jusqu’à votre village ? La même chose est vraie pour Dieu. Du point de vue de Paramatman, vous êtes antérieur au monde. Du point de vue du jiva, le monde vient en premier et ensuite vous. Le Jnani ne recherche pas de gloire extérieure. L’identification au corps et à son nom constitue l’ego. Tant que la peur de la mort est présente, vous n’avez pas réalisé le Soi.
Prenez le temps de rester avec ce dont vous avez connaissance avant d’expérimenter le monde. Pensez à la métaphore du rêve, que j’ai évoquée auparavant.
Pour un homme, la compagnie d’une femme signifie désir. Quand il y a désir, il y a attente. Quand il y a attente, il y a espoir. Quand il y a espoir, il y a emprisonnement. La cause de l’emprisonnement est le désir. Là où il y a « Je » et « Tu », il y a pure illusion. Là où il n’y a pas de « Je » et « Tu », il y a pur Brahman.
Nisargadatta Maharaj
jeudi 2 novembre 1978
Nirupana 70
Extrait de “Méditations avec Sri Nisargadatta Maharaj” éd.Aluna